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19 février 2007 1 19 /02 /février /2007 19:00
Un film de David Lynch
 
USA (2007)
 
OFNI (env. 2h52)
 
Avec: Laura Dern, Justin Theroux, Jeremy Irons, Harry Dean Stanton, Karolina Gruszka, Jan Hench…
 
 
 
 
Résumé : Nikkie Grace, une actrice de Hollywood reçoit la visite d’une étrange dame qui lui prédit qu’elle sera choisie pour interpréter le rôle principal dans le dernier film de Kingsley Howard, un metteur en scène très en vue. Mais que cet évènement sera suivi d’un adultère de la part de Nikkie puis d’un meurtre. Peu de temps après Nikkie reçoit un appel lui annonçant qu’elle a obtenu le rôle. Pendant la préparation du tournage Kingsley Howard avoue aux comédiens que le film est en fait un remake d’un autre film inachevé pour cause que plusieurs membres de l équipe de l’époque furent assassinés. Peu à peu Nikkie semble perdre ses repères et confondre sa propre existence et celle de son rôle...
 
Tout le monde dit c’est génial
 
Quand on voit avec quel enthousiasme la majorité de la presse accueille Inland Empire, énorme cauchemar conscient de David Lynch, cela peut réjouir mais cela peut aussi laisser dubitatif. Car comment ne pas y voir une profonde hypocrisie de la part des critiques qui adulent le film sans jamais expliquer les raisons qui font qu’elles l’ont soit disant tant aimé (en gros c’est on comprend rien donc c’est génial). Un phénomène qui s’explique par le fait qu’aimer Lynch c’est devenu branché dans les milieux intellectuels (enfin bobo quoi !) et que ça donne l’air intelligent. On a bien sûr le droit d’adorer Inland Empire  (et les raisons ne manquent pas) mais il faut dire pourquoi, sans forcément décrypter le film. Mais revenons au film lui-même.   
 
L’empire des sens
 
Clamé haut et fort qu’on n’a rien compris après avoir vu le dernier film de David Lynch n’est pas non plus un argument valable pour critiquer une œuvre du maître de l’angoisse et de l’étrange. Car l’intérêt de films comme Eraserhead, Twin Peaks, Lost Highway ou Mulholland Drive… réside avant tout dans l’ambiance oppressante et malsaine distillée et le ressentir du spectateur, plus que dans le sens et la compréhension de l’intrigue. Et Inland Empire n’échappe pas à la règle et fait appel aux sens et non à la logique du spectateur, qui devra faire un effort pour plonger tête la première, dans ce trip hallucinatoire dont on est sûr de ressortir différent lorsque l’on est entré. Alors si vous n’êtes pas un amateur du cinéma expérimental de Lynch ou bien un novice voulant découvrir la filmographie du metteur en scène, passez votre chemin car vous vous infligerez une torture inutile (le film dure presque 3 heures et ça se sent parfois) ou vous serez dégoûtés illico de ce cinéma sensitif qui ne ressemble à aucun autre, sauf à celui de son auteur, qui semble de moins en moins vouloir donner les clés permettant de décoder son œuvre.
 
Déjà Vu
 
Je n’essayerai pas d’expliquer ici le propos du film où même de l’analyser, car d’un, je ne suis pas le meilleur pour ça, de deux, prétendre avoir compris Inland Empire après seulement une vision serait d’une prétention mal venue, et de trois, selon sa propre perception chacun peut comprendre le film d’une manière totalement différente de celle d’un autre. Ce qui est sûr c’est qu’Inland Empire peut se voir comme un film somme du cinéma de Lynch où l’on retrouve toutes les composantes de son univers: dédoublement physique de la personnalité (représenté par l’actrice Laura Dern qui joue ici deux personnages), l’oracle qui annonce au personnage principal ce qui va se passer, le passage entre la réalité et le rêve, le casting qui fait la part belle aux habitués du réalisateur (Laura Dern, Justin Theroux, Naomi Watts, Harry Dean Stanton…), la disparition… De plus comme dans Mulholland Drive l’intrigue nous plonge dans les recoins sombres de Hollywood (l’univers des prostitués traînant sur Hollywood Boulevard, les médias cherchant à tout pris le scandale…) bien loin de l’image glamour habituelle servie. On trouve aussi certaines réminiscences du personnage de Naomi Watts dans ceux interprété par (l’époustouflante) Laura Dern. D’où le sentiment que David Lynch fait un peu du sur place dans son propos. Le film peut se voir  comme un chant du cygne d’une certaine forme du cinéma et de Hollywood, sous influence d’Alice au pays des merveilles (les personnages habillés en lapin), en même temps qu’un bilan de la carrière cinématographique de Lynch. Si on peut regretter l’absence (possible) d’avancée thématique dans le film il n’empêche qu’Inland Empire marque une évolution formelle importante dans l’œuvre de l’auteur.
 
On est toujours mieux servi que par soit même…
 
La grande nouveauté se trouve donc dans la forme du film qui cette fois-ci fut tourné en caméra DV. Lynch à découvert depuis peu les joies du numérique et en est devenu le plus farouche défenseur. En effet, le réalisateur à particulièrement apprécié les libertés artistiques que pouvait lui offrir l’utilisation de la DV : il a lui-même cadré les plans, fait la prise du son, le montage, le mixage sonore, la distribution (la phrase « un film de… » n’a jamais été aussi bien employé)… bref Lynch a adoré le fait de pouvoir participer à toutes les étapes de créations d’une œuvre cinématographique, au point qu’il a annoncé d’abandonner définitivement l’utilisation du 35 mm. Comme le propos de son film semble évoquer, le cinéma tel que nous le connaissons, serait révolu (selon Lynch) et doit faire place à une nouvelle ère, celle du numérique donc. Un choix qui peut décevoir les amateurs d’images léchées (comme moi) auxquelles nous avait habitué le cinéaste mais il faut avouer que l’image crapoteuse et granuleuse de la caméra numérique trouve naturellement sa place dans l’ambiance hallucinatoire et cauchemardesque du film. Si elle confère parfois un côté cinéma amateur (repoussant), elle amplifie également par son aspect « sale » le mal être et l’angoisse du spectateur (j’ai failli me pisser dessus à un moment). A la fois stagnant et évolutif, intriguant et répulsif, novateur et répétitif, Inland Empire est une déception autant qu’une réjouissance de la part de son metteur en scène. On espère seulement que la prochaine fois, Lynch saura utiliser de manière complètement nouvelle et originale son support et faire évoluer son cinéma vers de nouveaux horizons. Une œuvre « mineure » dans la carrière de Lynch mais indubitablement intéressante (à part le final qui est un grand n’importe quoi) et qui risque de s’améliorer au fil des visionnages.
 
Pour faire court : Une nouvelle plongée dans les méandres de l’âme humaine par l’inégalable David Lynch. Un cauchemar éveillé, certes trop long, où l’auteur semble stagner dans sa réflexion mais l’expérience vaut la peine d’être vécue.
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